Belgique: «Métis», le projet de recherche pour retrouver ses origines [1/3]
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En Belgique, les archives de l’État aident les métis nés pendant la colonisation en Afrique centrale à retrouver leur racines. Non-reconnus par leur pères blancs, considérés comme une anomalie dans le système raciste mis en place par l’administration coloniale, des milliers d’enfants métis ont été arrachés à leurs familles maternelles africaines et placés dans des institutions religieuses à l’écart du reste de la population. Certains n’ont jamais connu leur père. D’autres ont été envoyés en Belgique où ils ont été considérés comme des orphelins et n’ont jamais revu leur mère. Mais, depuis 2019, un projet de recherche soutenu par le gouvernement leur permet, ainsi qu'à leur descendants, de faire la lumière sur leurs origines. Reportage.

Antoinette Uwonkunda a rendez-vous aux archives de l’État. Elle y a d’abord entamé des recherches sur son père, un métis né pendant la colonisation belge et placé dans une institution religieuse au Rwanda. Aujourd’hui, elle tente de déterminer ses liens de parentés avec d’autres descendants de métis qu’elle a rencontré, et qui portent le même nom.
« C'est très important de savoir, lance-t-elle. Pour une fois dans ma vie, j'ai peut-être des cousins, alors que je me suis toujours sentie seule au monde. Du côté de mon père, je ne connaissais rien. Mais maintenant, je suis en train de trouver ma famille ! »
Depuis le début du projet fin 2019, suite à l’adoption d’une résolution par le parlement belge, près de 300 métis ont lancé des recherches aux archives, guidés par des historiens qui épluchent et trient des centaines de milliers de documents témoignant de la ségrégation ciblée mise en place par l’administration belge à l’encontre des métis.
« La question du métissage animait fortement l'État colonial »
La chercheuse Ornella Rovetta y participe. Elle explique : « On voit que la question du métissage anime fortement l'État colonial. Et donc il y a une série de réponses qui sont apportées, de l'ordre civil, de l'ordre scolaire et de l'ordre de séparation de ces enfants de leur famille, pour être envoyés, parfois à des distances très importantes, dans différentes institutions religieuses. »
Les trajectoires personnelles viennent ici nourrir le récit de la grande histoire, puisque l’équipe de chercheurs planche en parallèle sur une étude scientifique globale sur la situation des métis dans les anciens territoires sous domination belge : soit la République démocratique du Congo, le Rwanda et le Burundi.
Pierre-Alain Tallier, coordinateur du projet , souligne : « Le système colonial belge était un système où le racisme et l'exclusion étaient extrêmement répandus, s'il n'en étaient pas le fondement même. En Belgique, on a peut-être eu pendant longtemps un regard assez idyllique sur la colonie. Cette étude, comme d'autres qui ont été réalisées par le passé, prouvera que c'était loin d'être idyllique, en tout cas pour ceux que l'on appelait à l'époque les indigènes. »
Les conclusions de ce travail devraient être présentées au parlement belge en 2026.
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